Le Dialogue entre Religion et Homosexualité: Espoir et Tension
Le 13 janvier 1998, Alfredo Ormando, un jeune homme Italien profondément blessé par la discrimination, s’est donné la mort sur la place Saint-Pierre devant le Vatican pour dénoncer la profonde homophobie de l’Église catholique. Par son geste extrême, Alfredo demandait au monde un dialogue entre la religion et la communauté LGBTQ+, un appel qui résonne encore aujourd’hui comme un appel à la justice et à la dignité. Depuis ce jour, le 13 janvier de chaque année est célébrée la Journée du dialogue entre les religions et l’homosexualité, une occasion de réfléchir et de s’engager sur une question qui est encore trop souvent ignorée ou traitée avec réticence.
Paolo Spina, docteur en médecine, passionné d’Écritures saintes et de théologie queer, affirme que si, à première vue, la religion et l’identité queer peuvent sembler éloignées, c’est précisément dans la rencontre entre ces deux univers que l’on peut découvrir un message d’espoir et de libération. Cette année, alors que l’Église catholique célèbre le Jubilé, une porte symbolique pourrait s’ouvrir au dialogue entre la communauté LGBTQ+ et l’Église. Le Jubilé, dans son essence biblique, n’est pas seulement un temps d’indulgence, mais un temps de rédemption pour les pauvres, les emprisonnés, les aveugles et les opprimés. Comme dans l’Évangile de Luc (4,18-19), où Jésus proclame l’année de la faveur du Seigneur, une année de libération pour tous ceux qui sont marginalisés et souffrent, aujourd’hui aussi nous pouvons interpréter ce message comme un appel à la communauté chrétienne pour qu’elle accueille tout le monde, indépendamment de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre.
Dans le contexte italien, la patrie d’ Alfredo Ormand, un pas en avant significatif, bien que laborieux, a été accompli ces dernières années. Au cours du processus synodal, en particulier, un débat a été ouvert avec des voix plus libérales en faveur de l’inclusion et de l’acceptation des personnes LGBTQ+ au sein de l’Église. Il a été explicitement question d’une voie qui non seulement répond aux besoins pastoraux, mais qui inclut également une approche « avec » les personnes LGBTQ+, plutôt que « pour » elles. Il s’agit d’un changement substantiel, même si les difficultés et les résistances restent évidentes. Comme l’a souligné Luigi Testa, professeur de droit et auteur, il est essentiel de se concentrer sur les signes positifs et les petits pas accomplis. L’engagement d’associations telles que La Tenda di Gionata, qui soutient le dialogue entre les communautés chrétiennes et LGBTQ+, est un signe d’espoir que le dialogue, même s’il est ardu, est possible.
Mais ce chemin n’est malheureusement pas homogène. Dans de nombreuses régions du monde, comme en Afrique, la situation est tout à fait différente. La position de l’Église catholique africaine sur la question de l’homosexualité est encore très rigide. Il y a exactement un an, le président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM), le cardinal congolais Fridolin Ambongo, a déclaré, au nom des évêques africains, que la Fiducia Supplicans du pape visant à bénir les couples homosexuels était « une confusion et serait en contradiction directe avec l’ethos culturel des communautés africaines ». L’Église en Afrique est en effet souvent confrontée à une culture influencée par des religions qui considèrent l’homosexualité comme un tabou, non seulement sur le plan religieux mais aussi sur le plan social. La position de la hiérarchie ecclésiastique africaine apparaît donc distante et intransigeante.
Cependant, un peu d’espoir émerge de l’engagement de certains prêtres et réalités locales qui, bien que discrètement, proposent d’accompagner les personnes LGBTQ+ dans leur cheminement de foi. Gay Christian Africa, par exemple, mène un dialogue avec certains prêtres africains qui, sans s’opposer explicitement à la position officielle de l’Église, tentent de tendre la main à ceux qui font l’expérience de la solitude et de la discrimination. Ce chemin, bien que long et semé d’embûches, représente un signe d’espoir et d’ouverture, une petite lumière dans un contexte souvent hostile.
Pour en revenir à l’importance de la Journée de dialogue entre religion et homosexualité, il est clair que le chemin n’est pas facile. Cependant, dans les moments de grande difficulté, comme celui qu’a vécu Alfredo Ormando, des lumières continuent à briller. Le dialogue entre religion et homosexualité, malheureusement encore loin d’être pleinement réalisé, est une nécessité pour construire un monde plus juste et plus accueillant. Aujourd’hui, plus que jamais, il est crucial que la communauté chrétienne, dans tous les coins du monde, œuvre pour l’acceptation, l’accueil et le respect de l’humanité de toutes les personnes, en particulier les personnes LGBTQ+.
Alfredo Ormando, qui a choisi le sacrifice pour exiger la justice, verrait peut-être aujourd’hui, 26 ans plus tard, une petite ouverture, un petit pas, mais pas encore la réponse complète qu’il attendait. Il serait toutefois encouragé de voir que le dialogue, bien que laborieux et lent, est en cours, et que de plus en plus de chrétiens, même en Afrique, commencent à comprendre que la foi ne peut être séparée de la justice et de l’amour inconditionnel pour tous, sans exception.