La Semaine sainte: le témoignage de deux jeunes LGBT à Goma
Alors que les catholiques du monde entier se préparent à célébrer la résurrection du Christ, dans l’Est de la République Démocratique du Congo, d’autres vivent un chemin de croix bien réel. La guerre, l’exclusion et la peur volent à des milliers de croyants le droit de vivre Pâques dans la paix — et pour certains, dans la dignité.
Depuis janvier, le Nord e et le Sud-Kivu est plongé dans une crise humanitaire majeure. Plus de 3 000 morts, 400 000 personnes déplacées, des familles brisées, des enfants enrôlés de force. Goma, capitale de la province Nord- Kivu, est en état d’alerte permanent. Et dans ce chaos, des voix s’élèvent timidement. Celles de Denis et Joseph (noms d’emprunt), deux jeunes hommes gays qui tentent de garder foi en Dieu malgré tout.
Double peine : être jeune, gay, et chrétien en zone de guerre
Denis et Joseph vivent dans une peur constante. Peur d’être arrêtés ou tués, peur que leur orientation sexuelle soit découverte dans une communauté religieuse peu tolérante. “On vit une situation délinquante, dans la peur permanente d’être enlevés, que ce soit de jour ou de nuit”, raconte Denis.
Dans cette région où la foi est profondément enracinée dans les cœurs, le Carême n’a rien eu de spirituel cette année. Les églises sont moins pleines, les prières sont faites dans la peur, et l’espérance semble suspendue. “Pendant ce moment de Carême, on aimerait vivre dans la tranquillité et que nos prières soient exaucées, mais on n’arrive même pas à se concentrer”, poursuit-il.
Une foi fragile, mais tenace
Il n’existe pas à Goma de communauté chrétienne LGBTQ+ organisée. Pourtant, Denis et Joseph cherchent malgré tout à faire coexister leur foi et leur identité. Une lutte intérieure permanente. “Le sentiment de culpabilité ne nous quitte jamais”, confie Joseph. “Mais pour l’instant, ce n’est pas notre priorité. Ce qu’on veut, c’est survivre.”
Malgré tout, ils gardent un espoir : vivre Pâques comme un miracle. “Que la résurrection du Christ témoigne de l’amour et de la puissance de Dieu”, dit Joseph. Sa prière, sobre mais puissante, résume leur désir profond :
“Je prie pour que nous puissions expérimenter cet amour puissant dans nos vies, en tant que gays, surtout nous qui vivons la guerre en RDC. Que le Christ ressuscité brise la haine entre nous et fasse naître la paix et la joie.”
Un appel à la solidarité mondiale
La guerre au Nord-Kivu est ancienne, mais elle connaît aujourd’hui un regain de violence dramatique. Elle reste pourtant largement oubliée par les médias internationaux. Pendant que les cloches de Pâques résonneront dans les cathédrales du monde, à Goma, beaucoup prieront simplement pour rester en vie un jour de plus.
Joseph, Denis, et des centaines de milliers d’autres gardent l’espoir, s’accrochent à chaque geste de soutien — matériel ou moral. Peut-être qu’en cette Semaine Sainte, si les catholiques du monde entier s’unissent dans la prière, leur miracle pourra, enfin, se réaliser.